L’exposition des Arts Décoratifs de 1925 offre à la Bretagne les possibilités d’évaluer ses avancées techniques et artistiques. Les faïenceries quimpéroises d’Henriot et d’HB la grande Maison exposent et présentent leurs œuvres et trouvent à cette occasion la matière d’une saine confrontation. La statuaire de rené Quillivic chez HB répond à celles de Nicot, Creston ou encore à celle de Mathurin Méheut, chef de file et directeur artistique de la maison Henriot.

La production d’une ligne de céramique en émaux sur biscuit de grès appelé Odetta apporte à HB fierté et renommée. Le grès est alors à la mode, cher et complexe à produire, il est néanmoins indispensable dans les collections de toute maison sérieuse. La matière noble ne sera pourtant pas produite dans les ateliers Henriot malgré les encouragements de Méheut de répondre à la concurrence.

En 1927, l’auteur du « Service de la mer » obtient une commande importante de mosaïque pour les sols des Messageries Maritimes. Méheut en confie la réalisation aux Établissements Gentil-Bourdet à Paris, Henriot ayant refusé. Il est invité cette même année par le directeur de la manufacture Nationale de Sèvres, Mr Lechevallier-Chevignard, à venir travailler et collaborer au sein de l’entreprise.

Méheut trouve rapidement à Sèvres, l’énergie, le matériel, les compétences et les volontés nécessaires à sa volonté de créer. La Manufacture s’est modernisée depuis peu et s’est adjoint les services d’un céramiste et ingénieur-chimiste : Louis Delachenal. Ce dernier modernise les formes, met au point de nombreux émaux, invente le « grès tendre » ou « grès fin » utilisé dès 1931 ; il est également responsable d’une politique commerciale de production en petite série, favorisant la manufacture à ouvrir largement ses portes aux Artistes. Delachenal et Méheut deviennent amis, leur collaboration s’avère fructueuse.

Mathurin Méheut travaille une bonne partie de l’année 1928 et en décembre expose à la Galerie Charpentier une quarantaine de sculptures et plats en Grès de Sèvres. La plupart, d’inspiration animalière, sont des pièces uniques. Cinq ou six œuvres seules sont destinées à une édition à cinq ou dix exemplaires. L’exposition est un succès, les sculptures presque toutes vendues. Notre groupe en grès date très probablement de 1928 et sa photographie figure dans les archives de Sèvres. L’examen de l’étiquette, presque illisible, nous renseigne sur le titre de l’œuvre de Méheut : « Cottus et Crabe ». Il est intéressant de découvrir dans les archives de la Manufacture la présence d’un autre groupe appelé « Cottus et crabe », ce dernier, plus grand, est un grès d’édition, d’inspiration très proche mais « enrichi » au sommet de deux poissons. Notre groupe est manifestement la première version du « Cottus », une pièce unique de l’artiste réalisée en grès à grosse chamotte et cuite dans les fours de la Manufacture Nationale de Sèvres.

Cottus et crabe

Sculpture en grès chamotté réalisée à la Manufacture Nationale de Sèvres.

Cachet en creux de la Manufacture, Inscription en creux « Original »

 Étiquette collée au revers portant les inscriptions en grande partie illisibles du titre et d’un numéro d’inventaire.

En noir d’oxyde et au pinceau sous la base, le nombre 11.

Dimensions : Haut : 18.5cm Profondeur : 24cm Largeur : 23cm

Bibliographie

Mathurin et Maryvonne Méheut, exposition thématique au Musée de la faïence, Bernard Jules Verlingue, 2003.

Reproduit page 155

Louis Delachenal, céramiste 1897-1966. Musée de Bretagne 2004

Sèvres, la Manufacture au XXème siècle, Michel Aveline éditeur. Jean Paul Midant.

Encyclopédie des céramiques de Quimper, Philippe Théallet, Bernard Jules Verlingue, éditions de la Reinette